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16 Octobre 2020
Un article du groupe thématique Santé de La France insoumise
Depuis 30 ans, le modèle solidaire de santé en France ne cesse d’être attaqué par les gouvernements successifs. La sécurité sociale, héritage du Conseil National de la Résistance, est passée de caisse collective des travailleur·ses administrée démocratiquement à une institution sous le joug de hauts fonctionnaires coupés des réalités qui acceptent qu’une part croissante des missions soient déléguées au secteur privé. Ces assurances privées ne cessent de croître sur le dos des travailleur·ses, compliquant sans cesse les démarches de remboursement.
La création de l’Objectif National de Dépense de l’Assurance Maladie (ONDAM) en 1995 a renversé le paradigme qui consistait à soigner d’abord et chercher les recettes correspondantes ensuite. Depuis ce moment, le secteur de la santé est sous-financé. Cette austérité s’est fortement intensifiée sous le quinquennat de François Hollande, et s’est poursuivie avec l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron. Pour diverses raisons démographiques, nous devons faire 4% de soins en plus chaque année. Cela signifie que pour faire l’ensemble des soins dans d’aussi bonnes conditions, le financement du secteur de la santé devrait également augmenter de 4% par an. Cela n’est jamais le cas. En 2019, la loi de financement de la sécurité sociale a fixé une augmentation du budget de 2,3% pour 2020 mais les 1,7% manquant représentent des dizaines de milliards d’euros. Ainsi, chaque année l’écart se creuse entre les budgets et les besoins.
Les hôpitaux publics, longtemps épargnés par les logiques managériales de réduction des coûts et des effectifs, sont quant à eux devenus des entreprises dirigées par des technocrates n’ayant que la rentabilité en tête. Les travailleur·ses ne contrôlent plus leur outil de travail. Toutes les réformes de « modernisation de l’offre de soin » impliquent des suppressions de postes et un raccourcissement des temps d’hospitalisation. L’hyper-technicité médicale et les séjours ambulatoires remplacent la prise en charge globale des patient·es. Le manque de matériel et le sous-effectif sont devenus systémiques pour augmenter la rentabilité. Les métiers et les salaires sont sans arrêt dévalorisés, poussant les travailleur·ses vers le secteur privé.
La découpe du soin en actes a favorisé l’émergence d’un modèle productiviste en ville comme à l’hôpital, transformant les artisans du soin en automates de la maladie. Les gestes et les cadences sont mesurés, poussant les soignant·es à toujours accélérer. Les métiers de santé se sont déshumanisés, mettant ainsi en souffrance les patient·es comme les soignant·es. En 2019, un mouvement social inédit a secoué le secteur de la Santé. Des mois durant, des centaines de services d’urgence étaient en grève. Les grandes manifestations étaient alors déjà sévèrement réprimées par le gouvernement.
La crise du Covid-19 a frappé ce système de santé très fragilisé et a révélé de grandes failles. En premier lieu, l’absence de stratégie au sommet de l’État, qui s’en remet aveuglément au marché pour régler les problèmes, a conduit à une situation de pénurie de masques, de tests et de médicaments et à de nombreuses incohérences dans la gestion de cette crise.
En second lieu, les politiques de fermeture de lits des hôpitaux nous ont fait frôler une catastrophe d’une ampleur inédite. Au plus fort de la crise, 2400 personnes ont été hospitalisées en réanimation en moins d’une semaine pour une capacité de 5000 lits sur le territoire national. Seul l’arrêt des activités programmées a permis d’augmenter le nombre de lits de réanimation, au prix de retards de prise en charge sur beaucoup d’autres pathologies.
Enfin, l’état des hôpitaux et les conditions de travail du personnel soignant qui souffre du manque de moyens matériels et humains et de la précarisation des postes ont été révélés. Tous les personnels de santé ont pourtant répondu présents. Le gouvernement a parlé de « héros » pour dépolitiser, installer l’image de personnes prêtes au sacrifice plutôt que de professionnel·les de santé exigeant de meilleures conditions de travail.
Le constat est le même pour les professionnels du secteur médico-social, comme les professionnels des EHPAD qui prennent en charge une population plus âgée et plus malade sans que les moyens nécessaires ne leur aient été donnés.
Le Ségur de la santé n’a été qu’une fumisterie de communication, comme l’avait été le grand débat pour éteindre les gilets jaunes. Un cadrage général gouvernemental et des semaines de débats pour un résultat très insatisfaisant :
L’arrivée de la seconde vague, qui souligne l’échec des mesures sanitaires prises depuis le déconfinement, n’empêche pas le gouvernement de poursuivre sa politique d’austérité. Si le ministre de la Santé reconnaît que le principal marqueur de la gravité de la situation sanitaire est le taux de remplissage des réanimations par des malades Covid (critères pour qualifier la zone d’alerte d’un territoire), il n’a toujours pas pris les mesures nécessaires pour limiter les conséquences catastrophiques à venir, et continue au contraire à détruire le secteur de la santé :
C’est pourquoi nous nous joignons aux mobilisations à venir et soutenons les revendications des syndicats en exigeant :
L’espoir de retrouver un système de santé d’excellence est bien là et ne dépend que de choix politiques. Le système de santé publique, à l’image de tous les services publics ne doit plus être vu comme un coût mais une richesse.
Gardons en tête que notre pays ruiné après la seconde guerre mondiale a su mettre en place un système de santé solidaire et efficace, il n’y a aucune raison qu’il n’y parvienne pas aujourd’hui.