6 Octobre 2023
Il y a un peu plus d’un an, le Président français Emmanuel Macron est venu aux États-Unis en apportant deux espèces potentiellement envahissantes à Washington. L’une n’était autre qu’un arbre et la seconde une répression de la liberté d’expression. Ironiquement, peu de temps après la plantation de l’arbre, les autorités l’ont déterré pour le mettre en quarantaine.
Cependant, l’espèce la plus dangereuse consistait en un organe de contrôle de la parole sur internet, une proposition ayant suscité des applaudissements enthousiastes de la part de nos idiots de politiciens. Même si nos politiciens aux États-Unis applaudissent Macron comme des idiots du village, la plupart des Américains sont de fervents défenseurs de la liberté d’expression. Elle coule dans notre sang.
Cela n’empêche cependant pas Macron, et d’autres en Europe, d’imposer unilatéralement le contrôle de la parole sur Internet grâce à une nouvelle législation en France et en Allemagne. Si vous pensez que c’est un problème européen, détrompez-vous.
Macron et son gouvernement tentent d’éliminer unilatéralement les pensées haineuses d’Internet. Le Parlement français a adopté une nouvelle loi qui donnerait aux sociétés Internet telles que Facebook et Google à peine 24 heures pour supprimer les discours haineux de leurs sites ou faire face à une amende de 1,4 million de dollars par violation. Un vote final est attendu la semaine prochaine. L’Allemagne a adopté une mesure similaire l’année dernière et imposé des amendes de 56 millions de dollars.
Français et Allemands ont cessé d’essayer de convaincre les États-Unis de renoncer à sa protection de la liberté d’expression. Ils ont compris qu’ils n’avaient pas besoin de le faire car, en imposant des sanctions pénalisantes, les grandes entreprises seraient obligées de censurer leur discours même avec des normes mal définies. Il pourrait donc en résulter une limitation de la plus grande invention favorisant la liberté d’expression dans l’histoire du monde. Tout cela se passe sans un soupir d’opposition du Congrès ou de la plupart des organisations de défense des libertés civiles.
Le geste des Européens frappe dans l’angle mort de la Constitution des États-Unis. Le Premier amendement fait un excellent travail de prévention des actions gouvernementales contre la liberté d’expression, et, la plupart des lois limitant la liberté d’expression en Europe seraient inconstitutionnelles aux États-Unis.
Cependant, bien que protégés contre Big Brother, nous restons totalement vulnérables à Little Brother, composé d’entreprises privées disposant d’un large pouvoir discrétionnaire pour limiter et contrôler le discours dans le monde entier.
Le président Emmanuel Macron et Mark Zuckerberg, le PDG de Facebook
Les Européens savent qu’il est peu probable que ces entreprises suppriment de manière chirurgicale du contenu pour certains pays. L’effet sera similaire à « l’exception Californienne ». Tous les États sont soumis à des normes uniformes en matière d’émissions de véhicules en vertu de la loi sur la propreté de l’air (Clean Air Act), mais une exception a été faite pour la Californie pour imposer des normes plus strictes. Plutôt que de créer des voitures spéciales pour la Californie, les normes les plus strictes ont tendance à régir la conception des voitures.
En terme de contrôle de la parole, les Européens savent qu’ils peuvent limiter la parole non seulement dans leur propre pays, mais aussi pratiquement aux États-Unis et ailleurs.
En effet, les Européens misent sur les succès passés. En 2013, un groupe d’étudiants juifs a utilisé les lois françaises pour poursuivre Twitter afin de le forcer à révéler l’identité de posts anonymes de commentaires considérés comme antisémites. À son crédit, Twitter s’est battu pour protéger l’anonymat, mais les tribunaux européens se sont prononcés contre la société, qui a finalement cédé. L’anonymat se réduit aussi rapidement que la liberté d’expression est écrasée dans ces pays.
Macron sait que les entraves européennes à la liberté d’expression peuvent être métastasées sur Internet. Elles ont déjà dévasté la liberté d’expression en Europe. Ces lois criminalisent les discours selon de vagues normes faisant référence à « inciter » ou « intimider » des personnes en raison de leur race ou de leur religion. Par exemple, le créateur de mode John Galliano a été reconnu coupable par un tribunal français d’avoir tenu des propos antisémites à l’encontre d’au-moins trois personnes dans un bureau de Paris. Au moment de sa condamnation, la juge Anne-Marie Sauteraud a lu une liste de remarques abusives utilisées par Galliano envers Geraldine Bloch et Philippe Virgitti. « Il a dit » sale pute « au moins mille fois », a-t-elle-dit à voix haute.
Dans un autre cas, le père de la candidate à la présidence conservatrice française, Marine Le Pen, a été condamné à une amende pour avoir qualifié les « personnes de la minorité rom » de « sentir mauvais ». Une mère française a été poursuivie en justice parce que son fils est allé à l’école avec une chemise marquée « je suis une bombe ». Un Allemand a été arrêté pour avoir une sonnerie de téléphone avec la voix d’Adolf Hitler. Un politicien conservateur allemand a été placé sous enquête judiciaire pour un tweet dans lequel elle accusait la police d’avoir apaisé une » bande de barbares violant des hordes d’hommes musulmans « . Même le ministre allemand de justice, Heiko Maas, a été censuré en vertu de ses propres lois pour avoir traité un écrivain d’idiot sur son compte Twitter.
Le résultat de lois aussi mal définies est prévisible. Une enquête récente a révélé que seulement 18% des Allemands se sentent capables de parler librement en public. Plus de 31% d’entre eux ne se sentent même plus libres de parler en privé avec des amis. Seulement 17% des Allemands se sentent libres de parler sur Internet et 35% affirment que la liberté d’expression est réservée aux petits cercles privés. C’est ce qu’on appelle faire peur, et il faut s’en méfier.
Les Nations Unies ont également demandé à nouveau que le discours haineux soit catégorisé ‘crime international’. Les nations musulmanes veulent que le blasphème soit inclus et Israël veut que l’antisémitisme soit criminalisé. Même dans ce pays, des politiciens comme Howard Dean et divers universitaires ont déclaré que le discours haineux n’était pas protégé par le premier amendement. La représentante Frederica Wilson a appelé à ce que les gens fassent l’objet de « poursuites » pour se moquer des membres du Congrès. Un récent sondage a révélé que la moitié des étudiants américains ne pensaient pas que le discours haineux devrait être protégé.
La triste ironie de la France à la tête des efforts visant à freiner la liberté d’expression est puissante. Jadis, le bastion de la liberté, la France, est devenu l’incarnation de l’une des plus grandes menaces internationales contre la liberté d’expression.
Cela a même conduit à une répression de la presse libre avec des enquêtes criminelles. Pendant des années, nous avons simplement regardé de notre côté de l’Atlantique et avons considéré ces tendances comme des problèmes européens. Avec ces nouvelles lois, cependant, c’est en train de devenir un problème mondial. Les espèces envahissantes de ce Macron sont sur le point d’envahir le Web.
Jonathan Turley
Article original en anglais : France has turned into one of the worldwide threats to free speech, The Hill,
Traduit par Wayan, relu par Lydia pour le Saker Francophone