Vaincre Hitler

Lire: Ghetto raciste                                              
 
 
 
 
 
 
" Voir défini l'Etat d'Israël comme un Etat juif est la clef de sa perte. Un Etat juif, c'est explosif, c'est de la dynamite." Ces propos sont ceux de l'ex-président de la Knesset de 1999 à 2003 et ex-président de l'agence juive, Avraham Burg   dans un entretien publié vendredi 8 Juin dans le quotidien Haaretz.
 
 
 
Q. Etes-vous toujours sioniste ?

 

R. « Je suis un être humain, je suis un juif et je suis un Israélien. Le sionisme a été un

instrument pour me transporter de l’Etat juif à l’Etat d’Israël (to move me from the

Jewish state of being to the Israeli state of being). C’est Ben Gourion qui déclarait que

le mouvement sioniste était l’échafaudage pour construire une maison et que, après

l’établissement de l’Etat, il devait disparaître. »

 

Q. Donc vous confirmez que vous n’êtes plus sioniste ?

 

R. « Lors du premier congrès sioniste, c’est le sionisme de Herzl qui a vaincu le

sionisme d’Ahad Ha’am. Je pense que le XXIe siècle devrait être le siècle d’Ahad

Ha’am. Nous devons abandonner Herzl et passer à Ahad Ha’am. »

 

Q. Cela signifie-t-il que vous ne trouvez plus la notion d’Etat juif acceptable ?

 

R. « Cela ne peut plus fonctionner. Définir l’Etat d’Israël comme un Etat juif est le

début de la fin. Un Etat juif, c’est explosif, c’est de la dynamite. »

 

Q. Et un Etat juif démocratique ?

 

R. « Les gens trouvent cette notion confortable. Elle est belle. Elle est à l’eau de rose.

Elle est nostalgique. Elle est rétro. Elle donne un sens de plénitude. Mais

"démocratique-juif", c’est de la nitroglycérine. »

 

(...) Q. Est-ce que nous devons abandonner la Loi du retour ?

 

 

R. « Nous devons ouvrir la discussion. La Loi du retour est une loi, elle est une image en miroir de Hitler. Je ne veux pas que Hitler définisse mon identité. »

 

Interrogé sur le fait qu’il n’est pas seulement un post-sioniste mais aussi un

anti-sioniste, il répond :

 

R. « Ahad Ha’am a reproché à Herzl que tout son sionisme avait sa source dans

l’antisémitisme. Il pensait à autre chose, à Israël comme centre spirituel – ce point de

vue n’est pas mort et il est temps qu’il revienne. Notre sionisme de confrontation avec

le monde est un désastre. »

 

Q. Mais ce n’est pas seulement la question sioniste. Votre livre est anti-

israélien, au sens le plus profond du terme. C’est un livre dont émane une

répugnance à l’égard de l’israélité.

 

R. Quand j’étais un enfant, j’étais un juif. Dans le langage qui prévaut ici, un enfant

juif. J’allais dans un heder [école religieuse]. D’anciens étudiants de la yeshiva y

enseignaient. La langue, les signes, les odeurs, les goût, les places. Tout.

Aujourd’hui, ce n’est pas assez pour moi. Je suis au-delà de l’israélité. Des trois

identités qui me constituent – humaine, juive, israélienne – je sens que l’élément

israélien me dépossède des deux autres.

 

(...) Q. Vous dites qu’Israël est un ghetto sioniste, impérialiste, une place brutale

qui ne croit qu’en elle-même.

 

R. « Regardez la guerre du Liban. Les gens sont revenus du champ de bataille. Des

choses ont été accomplies, d’autres ont échoué, il y a eu des révélations. Vous 

 

pourriez penser que les gens du centre (mainstream) et même de la droite 

comprendraient que l’armée voulait gagner et qu’elle n’a pas gagné. Que la force

n’est pas la solution. Et puis on a Gaza, et quel est le discours sur Gaza ? Nous

allons les écraser, nous allons les éradiquer. Rien n’a changé. Rien. Et ce n’est pas

seulement nation contre nation. Regardez les relations entre les gens. Ecoutez les

conversations personnelles. Le niveau de violences sur les routes, les déclarations

des femmes battues. Regardez l’image d’Israël que renvoie le miroir. »

 

Q. Vous dites que le problème n’est pas seulement l’occupation. A vos yeux, Israël est une sorte d’horrible mutant.

 

R. « L’occupation n’est qu’une petite partie du problème. Israël est une société

effrayante. Pour regarder la source de cette obsession de la force et pour l’éradiquer,

vous devez affronter les peurs. Et la méta-peur, la peur primaire, ce sont les six

millions de juifs qui sont morts avec l’holocauste. »

(...)

Q. Dans votre livre, nous ne sommes pas seulement des victimes du nazisme. Nous sommes presque des judéo-nazis. Vous êtes prudents. Vous ne dites pas qu’Israël est l’Allemagne nazie, mais vous n’en êtes pas loin. Vous dites qu’Israël est dans le stade de l’Allemagne pré-nazie.

 

R. « Oui. J’ai commencé mon livre par l’endroit le plus triste. Comme un deuil, mais

un deuil d’Israël. Alors que j’écrivais, je pensais à un titre : "Hitler a gagné". Je

pensais que tout était perdu. Mais, petit à petit, j’ai découvert que tout n’était pas

perdu. Et j’ai découvert mon père comme représentant des juifs allemands, qui était

en avance sur son temps. Ces deux thèmes nourrissent mon livre du début à la fin. A

la fin, je deviens optimiste et la fin de mon livre est optimiste. »

 

Q. La fin est peut-être optimiste, mais tout au long du livre vous dressez un signe d’égalité entre Israël et l’Allemagne. Est-ce vraiment justifié ? Y-a-t-il une base suffisante pour cette analogie ?

R. « Ce n’est pas une science exacte, mais je vais vous donner quelques éléments

qui s’inscrivent dans cette analogie : une grande sensibilité à l’insulte nationale ; un

sentiment que le monde nous rejette ; une incompréhension aux pertes dans les

guerres (unexplained losses in wars). Et, comme résultat, la centralité du militarisme

dans notre identité. La place des officiers de réserve dans notre société. Le nombre

d’Israéliens armés dans la rue. Où est-ce que cette foule de gens armés va ? Les

expressions hurlées dans la rue : "les Arabes dehors".

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