L’« hôpital » de la prison israélienne de Ramleh : témoignage

Ci-dessous un témoignage d’Akram Salameh, arrêté à Gaza et emprisonné en Israël pendant plus de 20 ans. Propos recueillis par Corporate Watch (Gaza City).

 

Akram Salameh a été libéré en octobre 2011 après 20 ans de prison grâce à l’échange de 1027 prisonniers palestiniens pour la libération du soldat israélien Gilad Shalit, capturé par le Hamas.

Akram, qui avait été infirmier avant son arrestation, a été pendant 13 ans un représentant des détenus malades de l’hôpital de la sinistre prison de Ramleh.

 

 

"Avant d’être arrêté, j’étudiais à Khartoum au Soudan pour être infirmier. J’ai été arrêté alors que je rentrais de l’université, au passage de Rafah, entre l’Egypte et la bande de Gaza. J’ai été accusé d’être un combattant pour le mouvement Hamas et un membre du Hamas. Ils ne m’ont pas accusé d’avoir participé à une opération du Hamas en particulier, mais mon adhésion au parti a été utilisée contre moi. J’ai été condamné à 30 ans de prison.

Au total j’ai passé 22 années dans les prisons de Ramleh, Nafha , Shikma et Ketziot qui se trouvent toutes en Israel et je peux citer d’inombrables exemples d’absence de soins pour des prisonniers malades.

Par exemple Moatassem Raddad, qui attend depuis plus de quatre ans un traitement pour un cancer de l’intestin.

Les Israéliens mettent les patients sur des listes d’attente mais ne reçoivent jamais le traitement. On avait promis une intervention chirurgicale à Moatassem il y a cinq ans, mais en novembre 2013 il attendait toujours.

De 1997 à 2011, j’ai vécu dans l’hôpital de la prison qui fait partie de la prison de Ramleh . J’étais un point de contact entre les autorités pénitentiaires israéliennes et les prisonniers, assurant notamment les traductions.

Il y a plus de 1000 prisonniers palestiniens malades et la majorité d’entre eux sont emprisonnés à Ramleh. Un grand nombre d’entre eux sont complètement paralysés.

La prison de Ramleh est surveillée par des caméras. Il y en a partout. Elles ont remplacé les soldats, qu’on ne voit quasiment plus du tout depuis 1994. Cette technologie moderne rend la vie plus difficile pour les prisonniers : les caméras voient tout et les micros enregistrent tout.

Pour revenir à ma cellule de là où je travaillais en tant que représentant, je devais franchir 22 portes automatiques. A chaque porte vous deviez parler à un soldat à travers un système de haut-parleurs. Si un détenu plaçait sa main sur la lentille de la caméra pour avoir un peu d’intimité, il était puni .

Cette partie de la prison est censée être un hôpital, mais si un détenu a besoin de soins médicaux les caméras ne peuvent pas l’aider. Si quelqu’un avait besoin d’aide, je devais attirer l’attention du soldat en faisant des signes devant la caméra, mais s’il ne regardait pas son écran, je ne pouvais rien faire. De nombreux prisonniers en sont morts.

Les médecins peuvent « se transformer en soldat »

Quand le médecin de la prison visite les détenus malades, il est accompagné par des soldats. En une seconde les médecins peuvent eux-mêmes devenir des soldats. Il est très facile pour eux d’attaquer ou opprimer les malades . Certains prisonniers sont paralysés et il est difficile pour les soldats de les fouiller, alors ils sont fouillés à nu par les médecins .

Akram nous a montré des photos de plusieurs prisonniers paralysés qui ont été régulièrement fouillés à nu par les médecins de la prison.

Il n’y a aucune raison médicale de procéder à une fouille à nu et, ce faisant, les médecins font le travail des gardiens de prison. La réalisation de ces fouilles à nu des détenus au nom des autorités de la prison rend les médecins complices de l’emprisonnement des prisonniers politiques palestiniens en violation du droit international.

Les médecins qui travaillent dans les centres de détention et d’interrogatoire omettent souvent de signaler les cas de torture et de mauvais traitements aux autorités judiciaires compétentes, de peur de perdre leur emploi. De même, les signes physiques de la torture et les mauvais traitements sont rarement signalés dans les dossiers médicaux des détenus, ce qui rend presque impossible pour les victimes de demander justice et réparation.

Souvent les médecins informent les agents de la sécurité israélienne sur l’état de santé d’un détenu pendant un interrogatoire et se rendent ainsi complices de la pratique de la torture et des violences physiques et mentales infligées.

Prisonniers libérés au seuil de la mort

L’IPS (Service des Prisons Israéliennes) libère des prisonniers juste avant qu’ils meurent, afin de ne pas être tenu légalement responsable de leur mort.

Ce fut le cas pour Rabee Ali, que j’ai appris à connaître parce qu’il était très malade et j’avais pour habitude de le soutenir en le nourrissant et en l’emmenant aux WC.

Il a reçu une balle dans le dos lors de son arrestation et avait développé un empoisonnement du sang . Il a bénéficié d’une libération anticipée en raison de son état de santé mais il est mort une semaine après .

 

Un autre prisonnier, Ashraf abu Dhra souffrait de dystrophie musculaire. Il a été arrêté en 2006. Son état s’est rapidement détérioré pendant qu’il était en prison. Achraf a été amené à Ramleh après son interrogatoire. Avant son emprisonnement, il faisait régulièrement de la physiothérapie. Les médecins de Ramleh ont refusé de le soigner. Son état s’est rapidement détérioré.

Akram nous a montré une photo d’Achraf avant son emprisonnement, puis une photo de lui, émacié, le jour de sa libération. L’association israélienne Physicians for Human Rights (Médecins pour les droits de l’homme) a déposé une requête devant le tribunal israélien pour qu’ Achraf bénéficie de la physiothérapie et cette demande a été accordée. Cependant, les autorités de Ramleh ont refusé de la lui accorder, en déclarant que c’était inutile. Il a été libéré il y a trois ou quatre mois après avoir purgé sa peine. Après une semaine, il est tombé dans le coma. Il est mort 40 jours après sa libération.

Comme l’association Addameer, nous vous demandons de manifester dans le monde entier le 17 avril prochain, mais aussi d’exiger l’expulsion de l’Association médicale israélienne de l’Association médicale mondiale, pour sa complicité dans la répression des prisonniers palestiniens.

 

Source : http://corporateoccupation.org/avoi...

(Traduit par Stéphane M. pour CAPJPO-EuroPalestine)

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CIB - Bâtiment A - 01210 Ferney-Voltaire. France

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